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Du colloque à venir

 

 

Du colloque à venir


Marine Lalonde

À quelques semaines du prochain colloque du RPH dédié à l’avenir de la psychanalyse, l’étude, la lecture, le travail ont commencé en préparation de cette journée.
Étude qui, pour ma part, se penche sur la question de la transmission de la psychanalyse. Un premier tour d’horizon m’amène à aller voir du côté de la formation des psychanalystes, hier et aujourd’hui, afin de sonder quelle voie celle-ci pourra prendre à l’avenir.
Quels écueils, quelles limites, quelle évolution sont à considérer pour que demain, l’être qui souffre puisse trouver un clinicien à qui parler cette souffrance ?



Au travers de mes lectures, un article de Radmila Zygouris, « La policlinique de Berlin », a attiré mon attention. Elle y écrit : “Ce qui m’avait intéressée dans la Policlinique c’est le fait que, dans le même lieu, les analystes recevaient les pauvres, les désargentés, toutes catégories confondues et les étudiants qui voulaient devenir psychanalystes. C’est une chose qui ne s’est jamais reproduite depuis. »
En effet, chose n’a certainement pas été reproduite. Cependant, elle a été, au RPH, réanimée par Fernando de Amorim, qui a proposé le dispositif de la Consultation Publique de Psychanalyse comme partie intégrante de la formation des psychanalystes.

La Policlinique, fondée en 1920 par Max Eitingon, était un lieu où se côtoyaient patients pauvres et plus aisés. Ceux qui en avaient les moyens n’hésitaient pas à venir soigner leur souffrance dans ce lieu reconnu pour ses psychanalystes aguerris et pour la formation soutenue qu’ils dispensaient aux jeunes praticiens, également en psychanalyse à la Policlinique. 
Psychanalyse personnelle, formation théorico-clinique et pratique de la psychanalyse constituaient les indispensables de cette formation.


Ces trois composantes doivent aujourd’hui continuer à représenter les fondamentaux de la formation des psychanalystes. Elles s’agencent, à l’instar d’un tressage, en un solide cordage dont le clinicien a besoin pour conduire les cures dont il a la charge. Faire fi d’un de ces trois éléments revient à condamner son travail à prendre forme molle, infructueuse, malcommode voire dangereuse.


Imaginons un psychanalyste qui ne ferait pas lui-même l’expérience du divan, ou un autre qui n’aurait jamais suivi une formation à la fois théorique et clinique ou encore un dernier qui, tout psychanalyste qu’il se dirait, ne recevrait pas de patients. L’affaire semble cocasse.
Elle l’est beaucoup moins lorsque l’on est amené à voir des cliniciens tentant comme ils peuvent de s’orienter dans une clinique qui les déroute, faute de balises leur permettant de s’y repérer et d’y cheminer.
Sur Internet notamment, se multiplient forums et groupes virtuels où des praticiens font état d’un cas clinique afin de demander conseils et indications à d’autres, parfois des dizaines, qui répondront à cette demande. Et ce sont donc là des dizaines de directions que le praticien dans la difficulté est invité à prendre. Et tout cela libre d’être lu par tout un chacun. 


Nous valons mieux que cela. Les patients qui nous confient la conduite de leur cure valent mieux que cela. 
Comment se fait-il que des praticiens diplômés des universités se tournent vers ces solutions illusoires plutôt que de faire appel à leur superviseur ? 



J’ai à l’occasion été amenée à présenter la formation du RPH à de nouveaux membres, désireux de commencer leur clinique à la Consultation Publique de Psychanalyse. Cette formation se présente ainsi : outre la psychanalyse personnelle et la pratique à la consultation, le clinicien s’engage à participer à un groupe d’études des œuvres freudiennes et lacaniennes, une supervision hebdomadaire, une réunion clinique mensuelle, un ou deux séminaires mensuels et à rédiger une intervention pour les colloques bi-annuels que l’École organise. 
A ceux qui répondent que c’est beaucoup, et encore davantage à ceux qui formulent que c’est trop, j’ai pu dire que c’était le minimum.
Et j’ai pu le leur dire car je fais quotidiennement l’expérience qu’un clinicien ne peut être endormi, ne peut se suffire de ses connaissances ou de ses années d’expérience. Il a cent fois à remettre sur le métier son ouvrage afin d’affiner sa technique, puis son style avant de pouvoir nourrir la théorie psychanalytique de ce que la clinique lui enseigne.

Se former à la clinique, c’est s’engager avec ardeur dans un travail, certes couteux, en temps, en argent, en investissement, mais payant. Payant car il permet d’avoir les éléments pour se repérer dans la clinique, de connaître la direction à suivre et les indications auxquelles se fier.

Cette formation, c’est en groupe qu’elle a lieu, au sein d’une association psychanalytique. Elle ne se fait pas seul dans son coin. Elle passe par le travail avec les psychanalystes plus expérimentés. Il ne s’agit pas là de trouver des maîtres à imiter, bien que cela puisse être tentant pour le débutant. Au contraire, c’est à leur contact et avec leurs questionnements et leurs indications, qu’il est notamment offert au clinicien, d’une part, de reconnaître la capture imaginaire dans laquelle il est susceptible d’être attiré et d’autre part, d’apprendre à s’en dégager.
Car là est la condition première pour qu’il trouve comment opérer dans le champ symbolique que constitue la cure psychanalytique.

Cette formation, je la défends car elle m’a amenée à pouvoir occuper la position qui est la mienne aujourd’hui, d’une clinicienne qui vit de sa consultation et qui, chaque jour, prend la mesure des effets de la psychanalyse. 


Cliniciens et universitaires ont à travailler en partenariat pour que des jeunes gens diplômés puissent, dès le début de leurs études, préparer le terrain qui sera celui de leur travail à la sortie. La formation du clinicien est sans fin et rien ne l’empêche de débuter le plus tôt possible, lorsque le futur clinicien découvre que là est son désir.