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Quoi faire de l’appel téléphonique d’un être qui souffre proche de Paris 75?

Réponse à Marie-Hélène Viel

Fernando de Amorim 
Paris, 12. IX. 2011

Elle m’interroge : « Peut-on dire que l’opération du clinicien recevant l’appel du SETU ?  consisterait à permettre le passage de l’« appel » au sens concret du terme (appel téléphonique) comme au sens figuré, « appel » selon la terminologie de la cartographie (se référer à la cartographie du RPH, proposée par Amorim) à la formulation d’une demande, marquant l’entrée possible en psychothérapie. Cela se réaliserait en interrogeant le patient sur son désir de savoir ». Non, attendre la formulation d’une demande est faible. Soyons plus exigeants. Une demande peut constituer un transfert psychothérapeutique, mais cela risque de rester dans ce registre. C’est une ambition tiède. Visons haut, visons une entrée en psychanalyse, même si pour cela, et en ce sens je repère votre prudence, Marie-Hélène, nous devons passer par une demande, demande de rendez-vous, de rencontre avec un psychothérapeute

L’appel téléphonique est toujours adressé à l’Autre. Pour cette raison, et inspiré de Lacan qui avait pioché cette notion chez Mélanie Klein, j’ai souhaité élargir cette notion d’appel à la clinique du psychanalyste en téléphonie et en institution médicale. 

Nous devons toujours partir du principe que notre visée est de transformer l’appel – qu’il soit téléphonique ou sous forme de maladie organique – en désir de savoir. Pour cela, quelques éléments sont exigés : la souffrance produite par le symptôme, la présence des affects, l’ignorance et le transfert qui, supposons-nous, naîtra et sera nourri au fur et à mesure des consultations.

C’est vrai que, surtout sans le désir de savoir, l’appel ne donnera pas lieu à un rendez-vous en consultation à l’extérieur. 


Notre première tentative, face à un appel téléphonique, est de préparer le champ opératoire, effectivement. Il consiste à faire en sorte que l’être puisse montrer sa plaie. S’il s’y refuse et se cache sous des arguments moraux, illogiques, affectifs, c’est parce qu’il n’a pas de désir de savoir. Il veut juste passer son temps, tuer l’ennui.


Il y a une dimension du réel que nous ne pouvons pas exclure. Je pense au fait que, celui qui reçoit l’appel ne puisse pas donner rendez-vous à l’appelant. Quand on souffre, on veut être entendu par la première oreille bienveillante qui pointera le bout de son nez ! Les sectes, ces religions de deuxième classe, ont très bien saisi cela. 

La différence entre une psychothérapeute et un gourou se dessine avec le temps. Les gourous sont toujours très doux et très gentils, puis, ils enlèvent leur accoutrement d’agneau et montrent leurs crocs. Les psychothérapeutes ne sont ni agneau ni loup, ils conduisent une psychothérapie vers une psychanalyse

Il me semble que ce qui peut justifier un appel soit la souffrance. Si nous faisons comme SOS Amitié, Dépression, Suicide et tant d’autres organisations, nous alimenterons un cercle fermé qui commence avec la souffrance (raison de l’appel téléphonique), exprime des affects qui affectent l’écoutant (conversation téléphonique), installe écoutant et appelant dans l’ignorance (le premier reste interloqué ou affecté, le deuxième vide son sac, jusqu’au prochain remplissage puisque la pulsion est « eine konstante Kraft », selon Freud). 

L’issue se trouve dans la cônification du transfert : l’écoutant adresse l’appelant vers lui-même ou vers un collègue qui puisse assurer le moment 3 de la clinique, à savoir la consultation à l’extérieur. C’est à ce moment que nous pouvons envisager une psychothérapie, voire une psychanalyse.