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À quoi sert la psychanalyse pour les soignants ?

À la santé des soignants

Fernando de Amorim
Paris, le .. IV. 2007

Les infirmiers des hôpitaux français souffrent avant tout d’une absence de soutien psychique au travail. C’est ce que révèle le « Quotidien du Médecin » daté du 30 mars 2007. Notre expérience au sein du SÉTU ? et de la CPP montre que les infirmiers sont plus disposés à demander de l’aide que les médecins. De ces derniers, comme l’affirme l’article, « on ne sait pas grand-chose. ». Sont-ils en bonne santé ? Apparemment non ! Même s’il est difficile d’obtenir un chiffre, nous savons que « le taux de suicide des médecins est trois fois plus élevé que celui de la population générale » et quant à leur façon de régler leurs soucis de santé en général : « autodiagnostic, auto traitement, addictions, etc. ».

S’agit-il d’identification à la toute-puissance qui colle à la peau de quelques soignants ? Nous conseillons la psychanalyse aux soignants car c’est une façon d’être proche de soi et de ne pas se laisser emporter par l’eau du bain de l’identification à la toute-puissance. Depuis les années 50, les psychanalystes français ont remarqué que « quand on est en psychanalyse on tombe moins malade. ». Pourquoi ne pas faire appel à un psychanalyste quand on est médecin ? Au sein de notre association, le RPH, les professionnels de santé sont vivement invités à faire une psychanalyse personnelle. Pour quelle raison ? Sont-ils malades ?

Les réponses sont subjectives, en fonction du cheminement de chacun. Ce que nous constatons c’est qu’il n’est pas anodin que quelqu’un puisse choisir de dédier sa vie à sauver autrui au détriment parfois de sa propre vie (familiale, sexuelle, amicale). À quoi sert la psychanalyse pour les médecins ? À les rendre plus humains car lorsqu’on s’éloigne de soi-même, lorsqu’on ne trouve plus de voie possible pour demander de l’aide à l’Autre, on ne trouve d’autre issue que la fenêtre, comme ce fut, malheureusement, le cas de notre collègue cardiologue qui « a mis fin à ses jours à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Paris), en se jetant par la fenêtre. ».

« Cet acte est-il lié à sa vie professionnelle ? Rien ne l’indique », affirme l’auteur de l’article, Madame Delphine Chardon. Quelle autre indication ? Sa vie professionnelle a indéniablement compté dans son choix de mettre feu à son être de cette façon-là, en prenant cette voie-là. Il est malheureusement dans notre tradition clinique que chacun travaille dans son coin, les médecins d’un côté, les psychanalystes de l’autre, comme si les malades, les psychanalystes, les médecins, les infirmiers n’avaient pas d’inconscient, pas d’histoire, n’avaient pas de gaz ni de tristesse. Les médecins travaillent comme des mécaniciens, comme des techniciens de l’organisme et du corps humain.

N’est-il pas temps d’accepter le discours de l’inconscient à l’hôpital ? Au bloc ? Dans les couloirs de l’institution hospitalière ? Dans la vie de tous les jours qu’on soit infirmier ou médecin ? Mais cela ne peut se faire que lorsque que chacun prend conscience qu’il ne peut pas vivre sans ce moment dans sa journée où il prendra soin de lui-même, écoutant ce qui le nourrit et l’anime depuis son plus tendre âge, à savoir, le désir. Et un désir on le sème, on le cultive, on en récolte les fruits à partir de sa psychanalyse personnelle, sur le divan du psychanalyste.

Les êtres changent à partir des soins portés à leur désir et non à partir d’un protocole supplémentaire, avec plus de paperasses qui empêche le médecin d’être clinicien, ce pour quoi il a été formé.