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A table !

 

 

Diane Sourrouille 

Hier, je me trouvais après une réunion de travail avec deux de mes collègues pour déjeuner. Ce moment commençait bien, les plats du jour arrivaient, colorés et alléchants. Voilà mon téléphone qui sonne une première fois, je réponds à un patient qui, comme convenu, m’appelle pour fixer son prochain rendez-vous. Je commence à manger et au moment où j’attaque ma deuxième bouchée, mon téléphone sonne de nouveau. Je décroche et j’ai une femme au téléphone, je me rappelle à ce moment là que je suis de permanence sur le SETU ?. Cette personne me dit qu’elle n’appelle pas pour elle,  « non non, moi tout va bien » me répond t-elle quand je lui demande, faisant semblant de ne pas avoir entendu, ce qui la fait souffrir, « j’appelle pour ma fille». Je lui demande donc puisqu’elle ne se saisit pas de ma question, quel est l’âge de sa fille. Madame me répond « elle a 25 ans », je lui propose alors de donner ma ligne directe à sa fille pour que je puisse discuter avec elle, « Ça m’arrange parce que là je suis au travail» me dit-elle et elle raccroche. S’ensuit l’appel de cette jeune femme et de deux autres encore.

Après avoir ri avec mes deux collègues de ces appels à la chaîne qui ne me laissaient pas le temps de profiter de mon plat, je me suis fait la remarque que cette situation était plutôt agréable au demeurant. Ne vous y trompez pas, mon corps me rappelait depuis un moment que la faim me tenaillait ! Mais ces appels répondaient à un autre appétit qui est le mien. Cet appétit, soutenu par mon désir, d’une clinique vivante, une clinique qui nous surprend toujours là où on ne l’attend pas. Et lors de mes permanences sur le Service d’Écoute Téléphonique d’Urgence du RPH, je suis servie. Je suis servie et c’est tout simplement délicieux.

S’il y a une chose que le SETU ? m’a apprise grâce à l’enseignement de Fernando de Amorim, c’est que cette clinique vivante commence dès l’appel. Celui-ci peut s’exprimer sous des formes multiples, ce peut être un appel téléphonique mais, les nouvelles technologies aidant, ce peut être aussi par un mail ou encore un post sur un forum, un blog. Ici, il faut entendre appel comme appel à n’importe qui. Ces appels peuvent prendre des formes très diverses, il y a par exemple pour la dame citée plus haut, celui de l’appel pour quelqu’un d’autre. Parfois ce sont des appels pour poser une question mais il arrive aussi que ce soient des appels pour dénoncer ou encore, des appels pour crier sa haine.

De tels appels nous en recevons tous les jours, certains font plus de bruit que d’autres. Que faire de ce qui se dit là, au téléphone ou sur un forum internet ?

C’est le travail du psychanalyste de s’en saisir selon la lecture que nous permet le dispositif psychanalytique afin de permettre que ces expressions d’amour, de haine, d’angoisse, de peur, puissent venir se dire dans le cabinet du psychanalyste.

C’est d’abord en comptant avec son désir de psychanalyste que celui-ci pourra faire l’offre d’une autre voie possible à l’être souffrant dans son organisme, son corps ou de ses pensées ; si ce dernier en est d’accord. Mais pour le psychanalyste, compter avec son désir n’est pas suffisant. Il doit aussi se former à la clinique psychanalytique, à pouvoir utiliser la boussole qui lui permettra de ne pas perdre le nord de la traversée d’une cure.

Au RPH, nous avons de quoi nourrir chacun si son désir est au rendez-vous. Il est possible d’y acquérir une formation théorico-clinique solide grâce aux groupes d’étude de Freud puis de Lacan, aux réunions cliniques, séminaires et colloques. Mais il est aussi possible en parallèle de sa traversée personnelle sur le divan du psychanalyste et d’une formation théorique, de commencer à recevoir des patients à la Consultation Publique de Psychanalyse (CPP).

Ainsi pour celui qui en a l’appétit, une nourriture de grande qualité existe.

Au lieu de gaspiller leur salive à médire, maudire, mal dire parce qu’aveuglés par le désespoir ou la haine, je propose à tous ceux qui appellent, de venir apprendre à bien dire sur le divan du psychanalyste. Et pour ceux qui en ont le désir, celui d’occuper la position de psychanalyste, je les invite à venir partager la table des membres du RPH.

Alors qui a faim ?

L’offre est sur la table.