Et c’est ce que titre une page saumon du Figaro de je ne sais quel jour de la semaine du 21 octobre 2024.[1]
Édith de Amorim
Paris, le 28 octobre 2024
Les pages saumon du journal Le Figaro sont le carnet rose sur front d’économies purgatives. Voici les annonces contenues dans cet article : depuis l’épidémie de Covid, les maladies mentales augmentent, et particulièrement chez les adolescents et les jeunes adultes.
Premières questions qui me traversent : est-ce que le virus détruit la sérotonine et la dopamine et l’endorphine et l’ocytocine d’un seul coup, comme il s’en est pris à notre goût et notre odorat ? Ou bien ne serait-ce pas plutôt le remède, nommé confinement, qui se serait révélé bien pire que le mal, altérant à tour de bras ces hormones indispensables à notre béatitude replète ? Mais là déjà, vous comprenez bien que nous quittons le terrain micro et macroéconomique. Revenons‑y.
Les chiffres des économistes le disent : la consommation des antidépresseurs a fait un bond de plus de 60 %, tandis que la hausse des antipsychotiques est de plus de 35 %, toujours depuis le Covid. Et plus simplement : « Un Français sur cinq est touché par une question de santé mentale » a souligné le Premier ministre, qui souhaite déstigmatiser et surtout prévenir et aussi repérer les signes, car l’enjeu financier est de taille : premier poste de dépenses de l’Assurance Maladie, devant le traitement des cancers. En conséquence, le gouvernement cherche à généraliser les PSSM pour premiers secours en santé mentale. Ces PSSM sont qualifiés « d’initiative originale inspirée du programme australien Mental Health First Aid [qui] incite les entreprises à former des ‘personnes-ressources’ susceptibles de détecter et d’aider leurs collègues en situation de fragilité, que ce soient lors de premiers symptômes, de l’aggravation d’un trouble connu ou d’une situation de crise. Les premiers secours, donnés jusqu’à ce qu’une aide professionnelle puisse être apportée, sont l’équivalent, en santé mentale, des gestes de premiers secours qui, eux, apportent une aide physique à une personne en difficulté. »
Une pensée me traverse (aïe) aussi : mais bon sang, pourquoi aller chercher en Australie, alors qu’à Paris il y a le RPH et les CPP qui fournissent déjà un travail d’accueil efficace à la souffrance psychique ? Si on saisit dans la langue de Shakespeare le Premier ministre et ses Ministres de la Santé français, on aurait une chance d’être entendus dans nos requêtes de locaux permettant aux étudiants, sous l’égide du Docteur de Amorim, de recevoir des patients ? J’aime Shakespeare…
Retournons à l’article économico-sanitaire-mental qui affiche l’objectif d’atteindre la formation de 150 000 secouristes en santé mentale avec l’aide de l’Assurance Maladie, puisque les « troubles ‘psy’ sont devenues la seconde cause d’absentéisme en entreprise ». Et qu’on se le dise : ladite Assurance Maladie « agit également envers les médecins gros prescripteurs d’arrêts de travail pour leur rappeler les bonnes pratiques. » Frankenstein get out of their speech! C’est du moins ainsi que je traduirai le propos de Jacques Lacan : « Il n’y a de faits que du fait du discours. » que nous rapporte Jean Clavreul[2].
Qu’on le dise à ces messieurs du Gouvernement et de l’Assurance Maladie : au RPH, les cliniciens soutiennent les souffrants à retourner au travail sans passer par les ordonnances ou le 49.3, mais par la loi de l’association libre. Qui dit mieux ? Lisez, Monsieur le Premier ministre, lisez, Monsieur Frank Bellivier, délégué ministériel à la santé mentale, les témoignages des cliniciens du RPH sur leurs cliniques face aux arrêts maladie : https://rphweb.fr Read us! Surtout, rappelez-vous que nos Universités forment déjà pléthores de jeunes gens à la psychologie qu’elles – et vous en tant que Gouvernement – laissent tomber sitôt la délivrance des diplômes. PSSM ? Pourquoi Si Souvent Maltraités, voilà une traduction pour votre dernier retranchement.
[1] « Dépression, troubles anxieux, addictions… Les entreprises se lancent dans la prévention en santé mentale », Le Figaro, 24 octobre 2024, consulté le 28 octobre 2024.
[2] Clavreul, J. L’ordre médical, Le champ freudien, collection dirigée par Jacques Lacan, Éditions du Seuil, Paris, 1978, p. 70. (Merci à Diane.)