Psychanalyse à l’Université
Fernando de Amorim
Paris, le 28. XI. 2013
Henri Roudier, de la SIHPP hier, et Laurent Le Vaguerèse, de l’Œdipe aujourd’hui, m’ont adressé une demande de signature « Pour l’enseignement de la psychanalyse à l’Université ».
Faut-il signer cette pétition ? Bien évidemment.
Mais signer, uniquement, n’est pas suffisant. Il faut réanimer la puissance symbolique de ce que signifie signer un papier. Je pense à la joie de cette jeune clinicienne, membre du RPH, qui a commencé à pratiquer dans les locaux de notre École et qui, cet été, a signé le contrat de location de son cabinet. Depuis, elle est partie de la CPP avec sa clientèle. La joie, cet été, d’avoir son cabinet, et aujourd’hui, la joie de s’inscrire sur les listes électorales et de se préparer, selon ses dires, à payer ses impôts. Elle a 29 ans, est membre du RPH depuis 4 ans. Elle vit de sa clinique, reçoit des patients payants et d’autres qui payent moins – dans le cadre de notre engagement social –, et donc, elle apporte de l’argent aux caisses de l’État.
Comment vouloir fermer un dispositif qui fonctionne socialement et économiquement ? Cela ne viendrait à l’idée d’aucun bureaucrate.
Moi, fils de la psychanalyse à l’Université, effectivement, je m’inquiète pour l’avenir de l’enseignement théorique de la psychanalyse à l’Université, mais pas pour l’avenir de la psychanalyse. La psychanalyse va très bien et son avenir est radieux, comme « la vie sans mystification », selon les mots du poète.
Cependant, ne soyons pas dupes, tout du moins, pas trop : si nous ne nous mettons pas ensemble, enseignement théorique et formation clinique dans les Écoles de psychanalyse, la psychanalyse à l’Université sera engloutie. C’est dans la logique des choses mortes.
Ainsi, signer n’est-il pas suffisant, il faut des actes concrets.
Le moment est venu pour que les Écoles de psychologie, puisque c’est d’elles que sortent la grande majorité des futurs psychanalystes (alors que j’écris ces lignes, j’apprends par l’« alerte info » du Point que « le chômage a reculé de 0,6% en octobre ». Cela nous concerne ? C’est au cœur même de notre affaire.)
Je reprends : le moment est venu pour que les étudiants de psychiatrie et des écoles de psychologie, puisque c’est d’elles que sortent la grande majorité des futurs psychanalystes, s’unissent pour former les nouvelles générations de psychanalystes.
Voulez-vous savoir la critique qui est faite à la formation des psychologues cliniciens ? « Comment former des professionnels qui ne trouveront pas de travail après leur formation universitaire ? » Dans une perspective administrative, une formation qui ne forme pas des cliniciens doit donner la priorité à celle qui forme des praticiens plus rapidement – je pense ici au marketing des técécistes.
Il est vital que les universitaires et les membres des Ecoles de psychanalyse se réunissent pour informer les étudiants de psychologie, de l’importance de a) commencer une psychothérapie ou une psychanalyse dès le début de leur cursus universitaire. Cela s’ils veulent devenir des cliniciens, s’ils veulent gagner leur vie en tant que clinicien ; b) commencer à recevoir des patients, sous la responsabilité d’un membre d’une École de psychanalyse.
D’où je sors ces conclusions : des ex-étudiants des Écoles de psychologie françaises orientées par la théorie psychanalytique.
Après quelques années de psychothérapie avec psychanalyste ou de psychanalyse, tout en suivant leur études de psychologie (ou de psychiatrie), ils désirent frotter leur désir de pratiquer la clinique. Le RPH appuie ce désir et, après le choix du superviseur, un patient – qui généralement vient par le biais du SETU ? et reçu à la CPP – leur est confié.
Depuis 1991, je confie des patients à des jeunes étudiants. Je n’ai jamais eu un seul problème avec eux ; je fais référence aux jeunes.
Aujourd’hui, quelques-uns sont moins jeunes. Ils gagnent leur vie avec leur clinique, ils continuent à soutenir l’idée de la CPP, qui est de ne pas fermer la porte au désir recouvert par la misère sociale.
La psychanalyse à l’Université continuera à exister si les universitaires se mettent d’accord avec les présidents des Écoles de psychanalyse pour, ensemble, former des cliniciens, et forger des styles. Dépêchons-nous mes amis. Il y a le feu en cuisine.