Marine Lalonde
Paris, le 14.IX.2017
Cette question se pose à la suite de la lecture de l’article de Soline Roy : « Fausse couche, le sourd chagrin », en date du 4 août 2017 et consultable sur le site du Figaro.
L’article fait état de l’insuffisance des « prises en charge » des femmes ayant vécues une interruption de grossesse spontanée, évènement courant – une femme sur quatre de moins de 40 ans sera concernée -, médicalement bénin et parfois traité avec banalité par les professionnels du soin, voire par les proches. L’article le détaille très bien : là où le médecin voit un diagnostic rassurant : « ce n’est pas une grossesse extra-utérine, le pronostic vital n’est pas engagé, et la patiente aura sûrement un autre enfant », la femme, elle, jusque-là mère en devenir, peut vivre l’évènement avec « culpabilité, chagrin et colère » comme le souligne une des études sur laquelle s’appuie l’auteur de l’article.
Le Docteur Philippe Deruelle, secrétaire général du Collège national des gynécologues et obstétriciens français, souligne que l’empathie et les explications rassurantes du médecin ne produisent pas toujours les effets escomptés. Nous n’en sommes pas surpris. Madame Lancelin-Huin, psychologue, propose plutôt d’indiquer à ces femmes où elles pourraient trouver une aide et alerte : « les femmes sont accueillies aux urgences gynécologiques par des internes qui ne disposent pas de protocole de prise en charge particulier ». C’est à nous, cliniciens à même d’accueillir ces femmes et de leur proposer un dispositif visant à apaiser leur souffrance, d’être relais de cette médecine d’urgence pour que chacun puisse travailler dans le champ qui est le sien.
Si la fausse couche est un sourd chagrin nous pensons que c’est parce qu’elle est un chagrin muet, qui ne trouve pas de lieu pour être dit et d’oreille pour être écouté. Le travail du clinicien est celui-là : assurer les conditions pour qu’une parole libre advienne et que de ses associations, la patiente puisse tirer un enseignement. Comme Anne, reçue en urgence quelques heures après une fausse couche, déçue, triste et en colère face à cette perte, parlant cette grossesse qu’elle a pourtant à peine souhaitée, mais qui lui avait été suggérée avec force par un gynécologue alarmé par un diagnostic présageant chez cette jeune femme de probables difficultés à concevoir un enfant. Quel désir était alors en jeu ? Ou comme Camille qui vient nous rencontrer et découvre au fil du temps qu’une part d’elle-même considère que sa fausse couche n’est que le juste retour des choses, punition bien méritée d’une IVG réalisée quelques années plus tôt.
Nous proposons aux médecins, aux internes et aux professionnels du champ médical un protocole clair : celui de donner aux femmes qu’ils soignent la possibilité d’aller à la rencontre d’un clinicien, en indiquant les coordonnées de la Consultation Publique de Psychanalyse. Nous savons ce protocole opérant et portons la conviction qu’il est une route profitable à celles qui viennent nous rencontrer, qu’elles soient désireuses ou non de devenir mère. Elles pourront, par ce cheminement, connaître un apaisement et se délester des fantasmes et constructions imaginaires qui barrent la route à l’expression de leur désir.