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Traiter la détresse psychique

Lucille Mendes
Morsang-sur-Orge, le 28 février 2019

Récemment, j’ai reçu Yann[1], jeune homme de 15 ans, au sein de ma consultation pour une psychothérapie. Il se présente comme malade ; ses maladies étant la phobie scolaire et la phobie sociale. Déscolarisé depuis plusieurs mois, il poursuit les enseignements par correspondance.

Yann est suivi par un psychiatre qui lui prescrit un antidépresseur (Seroplex, 10 mg par jour, en une prise à heure régulière). Lors d’une séance, Yann indique qu’il va remplir un dossier MDPH avec son psychiatre pour bénéficier d’aménagements spécifiques en lien avec son handicap. Il dit qu’il est handicapé car sa maladie l’empêche de reprendre une scolarité normale. Pour ma part, je n’ai pas d’argument clinique pour déclarer qu’il est malade ou handicapé. En revanche, il souffre et cette souffrance peut se régler dans sa psychothérapie.

Lorsque les psychiatres – à la formation organiciste – s’occupent de la détresse psychique, il s’agit d’une erreur épistémologique. En effet, la souffrance psychique est d’un autre registre que celui de l’organisme. Lorsqu’une personne souffre psychiquement, il ne s’agit pas de traiter cette souffrance comme une maladie ou un handicap car elle ne souffre pas sur le plan organique. De surcroît, les traitements psychotropes et les dispositifs MDPH représentent un coût élevé pour l’État et le contribuable, d’autant plus élevé qu’ils ne sont pas utilisés de façon appropriée.

La souffrance psychique est d’un autre registre. Elle signale qu’un désir est en souffrance et que ce désir cherche à s’exprimer mais ne trouve pas d’autre voie que celle du symptôme. Comme l’a théorisé Fernando de Amorim à partir des concepts freudo-lacaniens, la souffrance est un choix de l’être dicté par la résistance du surmoi et le grand Autre non barré. L’être ne veut rien savoir sur sa responsabilité dans sa souffrance et sur son désir inconscient. Souvent – la clinique en témoigne – il préfère s’identifier aux statuts, prescrits par le psychiatre, de malade ou de handicapé qui le déchargent de toute responsabilité.

Pour le traitement de la détresse psychique, la seule voie est celle de la psychothérapie avec psychanalyste et la psychanalyse, selon l’appellation de la cartographie du RPH[2]. Les associations libres, règle fondamentale de la psychanalyse, permettent à l’être de démêler et de traiter sa souffrance ; la visée de la cure étant qu’il trouve une autre façon de s’inscrire dans son existence. Le RPH encourage ainsi une clinique du partenariat pour une articulation cohérente entre le champ médical et le champ psychanalytique.

[1] Les éléments permettant de reconnaitre l’identité de cette personne ont été modifiés afin de garantir son anonymat.
[2] Amorim (de), F. (2008). Tentative d’une clinique psychanalytique avec les malades et les patients de médecine, RPH, Paris.